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La dessinatrice et autrice de bandes dessinées participe aux Assises européennes de lutte contre les violences faites aux femmes, dont elle signe l’affiche. Engagée dans les combats féministes, Pénélope Bagieu travaille à valoriser les personnages féminins et ainsi agir sur les représentations stéréotypées, terreau des violences sexistes et sexuelles.
Vous avez réalisé l’affiche des Assises européennes de lutte contre les violences faites aux femmes, qu’est-ce qui vous a intéressée dans ce projet ?
Tout le monde prend la parole sur les violences faites aux femmes mais je trouve très important de sortir des grands discours sur le sujet et de donner la parole aux personnes concernées et à celles qui sont sur le terrain. C’est ce que permettent les Assises, il me semble. C’est aussi ce que j’ai voulu dire dans l’affiche : montrer des femmes qui sont sujets et non objets, qui sont combatives, qui sont différentes mais regardent dans la même direction. C’est aux femmes, et à toutes les femmes, de mener le combat : on voit bien que les gens qui ne sont pas concernés par ces violences sont moins pressés de régler le problème.
L’idée de rendre les femmes visibles traverse votre œuvre, quel lien faites-vous entre la mise en valeur de modèles féminins et la lutte contre les violences faites aux femmes ?
C’est difficile de rêver d’un modèle qu’on n’a jamais vu. Quand on s’adresse à un jeune public, il est primordial d’offrir des personnages féminins auxquels se référer. Si on entend parler d’une femme qui a eu un rôle important, puis d’une autre et ainsi de suite, alors on finit par se dire que les femmes ont toujours été là, mais que l’Histoire a oublié de les montrer. Pour moi, c’est une manière de redonner leur place aux femmes dans nos inconscients et de ne plus croire à cette Histoire où nous n’avons pas d’importance, et qui délégitime nos luttes.
À quel moment situez-vous les débuts de votre engagement féministe ?
Je pense que le fondement féministe a toujours été là. J’ai été élevée par une mère seule, dans un environnement féminin où ma grand-mère et ma sœur avaient beaucoup d’influence. J’ai grandi en pensant qu’être fille n’avait aucune importance, je n’ai été empêchée de rien jusqu’au jour où je suis sortie de la bulle familiale et que je me suis confrontée à l’extérieur. Et là je me suis dit « en fait le monde est vraiment dégueulasse pour les filles ». Quand j’étais ado, j’ai compris qu’on n’avait pas les mêmes droits que les garçons dans l’espace public : on ne pouvait pas rentrer seule le soir, s’habiller comme on voulait, ou boire autant qu’eux en soirée sans risquer d’être agressées. Le coup de grâce, cela a été le monde du travail. On ne m’écoutait pas de la même manière, il fallait toujours que je sois mille fois plus perfectionniste que les hommes pour être prise au sérieux. Petit à petit, j’ai pris conscience que je n’étais pas un cas isolé, que tout cela participait d’un système qui avait un nom : le patriarcat. Les rencontres avec les militantes, le collectif, les manifestations ont changé beaucoup de choses. Ça fait du bien d’être en colère toutes ensemble et pas seule chez soi : il y a quelque chose de très joyeux et enthousiasmant dans la lutte !
Propos recueillis par Anne Dory
Photo Eva Cagin
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